24 décembre 2008

Guérisseur

- Viens par ici!
Tout en parlant, la fillette se précipita parmi les herbes de la plaine. Jillian, s'aidant de son bâton qu'il n'avait jamais lâché durant son sommeil, se mit à la suivre. Il la retrouva près d'un petit ruisseau, en train de se tremper les pieds.
- L'eau est bonne et pure par ici!
Elle sourit en regardant le garçon qui trempa ses pieds nus à son tour. Les bottes que Mars lui avaient fabriqué dans le passé avait mal vieilli durant sa fuite éperdue, et il s'était finalement résigné à marcher pieds nus. Le sol était cependant beaucoup moins retors qu'en Brocéliande : moins de branches acérées gisant au sol, moins de cailloux pointues prêts à vous écharper la plante des pieds, moins de bêtes cachées sous les feuilles mortes, en attente de la chair fragile de membres postérieurs. En fait, il se sentait mieux sans celle-ci, alors que leur protection n'était plus véritablement utile.
Chassant de son esprit ces pensées d'un temps révolu, il porta à nouveau son regard sur le présent. Les habits de la fillette étaient bien loin d'être riches, mais il était coud avec délicatesse, ce qui les rendaient charmants. Et leur porteuse était vraiment mignonne. De longues boucles blondes courraient ses épaules et encadraient deux yeux verts remplis de gentille malice. Elle tourbillonna dans l'eau en éclatant de rire, et se retourna vers Jillian, qu'elle éclaboussa avec joie.
Il resta un petit moment interloqué, n'ayant jamais eu de camarades de son âge pour jouer. Mais il se reprit vite et riposta dans l'intant. Et pendant quelques minutes, il oublia son passé et ses soucis, arrosant et se faisant arroser de tout son être. Il put rire véritablement, comme il ne l'avait jamais encore fait, comme seul un enfant, inconscient des dangers du monde, pouvait rire.
Un aboiement interrompit la rêverie. La première réaction de Jillian fut de s'inquiéter pour son amie. Si ses poursuivants étaient là, elle serait en danger. Mais avant qu'il n'ait pu se décider sur la marche à suivre, la petite fille s'était déjà précipité vers le lieu d'où venait le jappement. Jillian n'hésita plus et se lança à sa suite. Il s'attendait à voir des hommes armés, ou quelques créatures féériques, mais pour tout comité de réception, il n'eut que la vision du chien, aboyant près d'une chèvre écroulée au sol, et de sa jeune amie, à genou à côté de l'animal allongé.
- Jill! S'il te plaît! Va trouver mon père! Elle est malade.
- Je..., dit-il sans bouger, hésitant.
- Vite! Elle risque de mourir!
- Justement! Je ne sais pas ce que pourrait faire ton père, mais je suis sûr que nous ne reviendrons pas à temps pour la sauver.
- Mais que...?
Jillian ferma les yeux, et sentit son pouvoir se réveiller au fond de lui. Il s'immergea dans le pouvoir du bâton qu'il avait créé, et brida son pouvoir. Puis il le tendit à la petite fille.
- Tiens-moi ça!
- Que...?
Il s'approcha et s'agenouilla à son tour à côté de l'animal malade. Il ferma les yeux et se laissa pénétrer par les énergies alentours. Il sentit les flux du vent autour de lui, la puissance de la terre sous ses pieds, les faibles ressources des herbes qui poussaient lentement. Puis il se concentra sur la chèvre. Il n'avait jamais vraiment étudié le métabolisme des animaux, mais il reconnaissait par les nœuds d'énergies certains organes, semblables à ceux des hommes. Il s'intéressa un certain temps à la structure de ce corps étrange, puis il commença à opérer. Il envoya une partie de son énergie propre dans le corps malade.
Utilisant celle-ci, il modifia les courants d'énergie interne, réparant malaise et lésions, petit à petit. Il agit avec prudence, évitant de blesser l'animal par de manipulations imprécises de ses forces. Puis enfin, il rouvrit les yeux. La chèvre fit de même en face de lui, et le regarda avec de grands yeux brillants. Même si elle ne put parler, il comprit qu'elle le remerciait. Puis elle se releva et s'éloigna, allant rejoindre ses congénères.
- Que s'est-il passé ?
Jillian se retourna et vit la surprise inscrite sur le viasge de la fillette. Elle était jeune, trop jeune pour être effrayée par un tel miracle.
- Elle allait mourir, tu t'es approché, et tu es resté deux heures comme ça, alors que du vent semblait sortir de ton corps et c'est bon, elle est guérie, s'exclama-t-elle d'une traite.
- N'en parle pas, s'il te plaît.
- Pourquoi ? Tu as fait un miracle!
- Des hommes mauvais me poursuivent, et s'ils entendent parler du miracle par ici, ils risquent de venir m'attaquer.
- D'accord, Je jure de ne jamais en parler, dit-elle avec sérieux.
- Merci Lucie, je t'en suis reconnaissant.
- Pas de problème. En revanche, si on ne veut pas être questionné en rentrant, on ferait mieux de rentrer maintenant.
- Tu as raison.
Les deux se mirent en route, derrière le troupeau que le chien reconduisait docilement à la ferme.
- Tu m'apprendras ?
- Quoi, demanda Jillian ?
- A soigner, comme tu l'as fait!
Jillian sourit. Il prit la main de la petite fille et s'insinua entre les énergies de la fillette, sans qu'elle ne s'en rende compte.
- Oui, répondit-il soudainement. Tu en as les capcités! Je ferais de toi une guérisseuse.

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